La méthanisation
(Par Guy Favand, professeur et vice président O.N.G. COEDADE RUP)
Leçon N°1 C’est quoi la méthanisation ?
1°) La méthanisation ‘’naturelle’’, ou comment la nature ‘’fait bien les choses’’ :
Depuis ‘’la nuit des temps’’, sur la Terre, toutes les matières organiques (dites fermentescibles) sont plus ou moins détruites par décompositions bactériennes en absence d’oxygène (anaérobiose) ….
· Sous une couche d’eau (étangs, mangroves, lacs …), dépourvue d’oxygène dissous, les végétaux et animaux morts entrent en décomposition et produisent des bulles de Biogaz
Dans les cimetières les ‘’feux follets’’ sont dus à la décomposition des corps, le Biogaz peut s’enflammer spontanément lors de certaines réactions chimiques …
Vous mangez des féculents, de la viande… ‘’vous avez des gaz’’ ; non, du Biogaz, première preuve que ce processus est naturel. Qui n’a jamais ‘’pété’’ ?
Dans les anciennes décharges (la législation ayant enfin évolué), la nature continue son travail en produisant du Biogaz. L’homme essaye de ‘’réparer’’ ses erreurs gravissimes en captant ces émissions de Biogaz avec des procédés coûteux et pas très efficaces !
La transformation des matières organiques en diverses substances chimiques durant la fermentation en anaérobiose se fait rapidement au cours d’une chaîne de dégradations successives grâce à de nombreuses espèces de bactéries, d’où le terme de Méthane Biologique ou Bio Méthane. (Voir leçon N°4 ‘’Critères à respecter pour bien méthaniser’’).
On distingue deux phases qui se succèdent dans le processus de fermentation méthanogène :
Il faut rappeler que le méthane non utilisé (càd non brûlé) est un puissant GES (Gaz à Effet de Serre), il faut donc contrôler, maîtriser sa production et surtout l’utiliser… bien entendu !
Le Biogaz contient une forte proportion de méthane (+ de 60%) mais aussi de l’hydrogène…
2°) La méthanisation "contrôlée", ou comment l'homme peut "bien faire les choses" en copiant la nature :
Il est relativement simple pour l’homme de ‘’copier’’ ces phénomènes naturels afin de contrôler les processus de la méthanogénèse, et donc de produire du Biogaz …très énergétique !
Pour résumer très simplement, un méthaniseur sera constitué d’un récipient étanche à l’air pour que les bactéries puissent se développer et ‘’travailler’’, étanche également pour récupérer tout le Biogaz produit.
Une multitude de types différents de méthaniseurs pour le particulier peuvent être envisagés. (Voir les leçons suivantes et les résultats des travaux de recherche appliquée… ).
3°) Qu'est-ce que le méthane?
Découvert par Volta en 1778, le méthane est un carbure d'hydrogène de la famille des alcanes(Cn H2 n2 ). Le Méthane est très léger (densité par rapport à l'air : 0,55), il ne s'accumulera donc pas au sol, contrairement au butane et au propane, et diminuera les risques d'explosions.
En vue d'un transport, ou stockage, il peut être soit liquéfié (refroidi à -164°C, cas des navires méthaniers) ou comprimé à 100, 200 bars… dans des réservoirs ‘’coûteux’’ !
Attention : le gaz dit ‘’naturel’’ est du méthane fossile , sa combustion dégage du carbone fossile et participe donc au changement climatique global. Il serait souhaitable de l’appeler ‘’gaz fossile’’ au lieu de ‘’gaz naturel’’ pour ne plus leurrer les usagers. Le méthane contenu dans le Biogaz est ‘’contemporain’’, il n’a pas d’impact sur l’environnement lorsqu’on le brûle (cycle très court du carbone).
Ces deux hypothèses (liquéfier ou comprimer le méthane) nécessitent des moyens industriels importants. Il faudrait commencer par extraire le méthane du Biogaz… on se limitera à conserver et utiliser le Biogaz sous forme gazeuse à pression atmosphérique normale.
Le méthane par rapport à sa masse, est le meilleur carburant sur le plan calorifique, mais le plus volumineux par rapport à sa faible densité.
Formule générale : CH4
A température ordinaire il est gazeux. Il est incolore, inodore, très léger et non toxique.
Le méthane brûle avec une flamme très claire, peu visible et très chaude, dont la réaction complète s'écrit ainsi :
CH4 + 202CO2 + 2H20 + 212 K cal (ou 886,16 Kilo Joules ou 0,25 KWh)
La quantité de chaleur dégagée est très importante (212 Kcal par molécule brûlée ou 22,4 litres, ce qui donne 13 250 Kcal au kilo ou 9 464 Kcal au mètre cube ou 11KWh/m3).
Le méthane s'enflamme à 715°C quand il est mélangé dans 5 à 14 fois son volume d'air.
La température de combustion est de 1 500 à 2 000°C (suivant le mélange).
Le mélange d'un volume de méthane et de 2 volumes d'oxygène ou de 10 volumes d'air explose violemment au contact d'une étincelle ou d'une flamme (coup de grisou dans les mines), d'où la nécessité de veiller aux conditions de sécurité et de le stocker brut sans air mélangé.
L'intérêt pratique du méthane est important sur deux aspects :
-Comme combustible industriel, il constitue une source d'énergie considérable.
- Comme matière première, il sert à la fabrication de l'hydrogène, de l'acétylène et se trouve au point de départ de nombreuses synthèses dont celle du méthanol (alcool à brûler).
4°) Quelques applications du biogaz et de son méthane :
- Utilisations dans l'habitat individuel ou petites collectivités en zones rurales, villages isolés par exemple en Guyane ou ailleurs…, pour la cuisson des aliments, gazinières, lampes à gaz, eau chaude instantanée (chauffe bain à gaz), groupes électrogènes ou tous moteurs à poste fixe (pompe agricole, groupe de soudure, nettoyeur Haute Pression, etc.). Techniques simples d’adaptation des moteurs thermiques 4 temps à poste fixe. (Voir leçons suivantes et procédés simples testés en milieu tropical…)
– Lutte contre la déforestation (ex. Haïti) en remplaçant le charbon de bois par du Biogaz.
– Petites entreprises de valorisation et gestion de la part fermentescible des déchets ménagers, production, distribution et utilisation du Biogaz ‘’sur place’’.
– Mise en place de petites unités de méthanisation dans les futurs centres de valorisation des sous produits de la consommation (et non pas des déchetteries !) par les municipalités, dans tous les types d’élevages, près des zones de cultures agricoles… (voir leçon N° 2)
- Extension du savoir faire aux pays de la Caraïbe, de l’Amérique du sud, des pays en voie de développement, car peu coûteux, simple à mettre en œuvre, accessible au plus grand nombre !
Ces leçons sur l’énergie propre de l'ONG COEDADE RUP basées sur des résultats réels de travaux de recherche appliquée vous permettront d’accéder à cette filière incontournable de la méthanisation contrôlée… et surtout, ces leçons vous permettront de ne plus dépendre des énergies fossiles… pétrole et ses dérivés, gaz butane, propane, charbon de terre…
Leçon N°2 : Que peut on méthaniser pour produire de l’énergie propre ?
Cela représente des volumes et masses considérables, ce ne sont plus des déchets mais des matières quasiment gratuites et renouvelables.
La méthanisation de ces fermentescibles produit une énergie propre, renouvelable et disponible sur place, sans être tributaire d’importations d’énergie fossiles.
Méthaniser ces déchets fermentescibles, c’est aussi la seule solution pour gérer et traiter intelligemment avec valorisations multiples ces matières au lieu de vouloir les incinérer ou de les enfouir !
La méthanisation contrôlée en amont permet de réduire considérablement les coûts des traitements des OM (Ordures Ménagères) en valorisant sur les lieux de production ces matières au lieu d’être obligé de commencer par les transporter sur route !
Leçon N°3 : Les avantages de la méthanisation contrôlée
1) Dépollution
Traitement intelligent, valorisant, peu coûteux en milieu tropical de toutes les matières organiques (fermentescibles) comparé à leur incinération, mise en décharge (illégale), compostage (déchets verts…).
Pour rappel, ce sont les fermentescibles dans nos ordures ménagères qui génèrent ces odeurs désagréables connues de tous !
Dans nos poubelles, ils correspondent à plus de 30% de la masse totale.
2) Désodorisation
Quels que soient les déchets (déjections de toutes natures, déchets d’abattage…), pendant la méthanisation il n’y a plus d’odeurs car cela s’effectue en anaérobiose (absence d’air), en fin de cycle, une légère odeur d’humus, c’est surprenant !
3) Production d'énergie renouvelable, propre, accessible "sur place"
Le méthane du Biogaz contrôlé (càd produit volontairement) n’agit pas dans les problèmes d’effet de serre comme le gaz dit "naturel" ou le butane ou le propane qui correspondent à un destockage gigantesque de carbone fossile !
Le méthane du Biogaz, ne participe qu’au cycle court ou contemporain du carbone, ce n’est plus un GES (Gaz à Effet de Serre) car vous l’utiliserez. Le Biogaz comporte aussi de l’hydrogène en proportion importante, gaz noble et particulièrement énergétique qui ne produit que de l’eau pure lors de sa combustion.
Effet cumulatif favorable pour lutter contre le changement climatique car le Biogaz produit volontairement correspond à autant de biogaz non dégagé dans l’atmosphère qui aurait été produit ‘’ailleurs’’ par la nature.
4) Aseptisation
En fin de cycle de méthanisation, les résidus de fermentation ne contiennent quasiment plus de germes pathogènes, comparés par exemple à certains déchets d’abattages, ou aux lisiers de porcs et boues des stations d’épurations utilisés actuellement (illégalement) en épandage sur des terres agricoles.
En fin de cycle, ces résidus passent en phase d’aérobiose, ils retrouvent l’oxygène de l’air et poursuivent leur aseptisation naturellement…
5) Production d'amendements organiques naturels
Les résidus de méthanisation ne sont pas des déchets, ce sont des amendements organiques naturels très riches qui remplacent les engrais chimiques. Ces amendements permettent de reconstituer et régénérer les sols pauvres, ils agissent comme accélérateurs naturels de croissance des plantes et limitent l’évaporation. Le recyclage de ces matières est complet.